dimecres, 22 d’octubre del 2008

2. Le pemier grand exil

Entre le 7 et le 10 avril 1938, il y a une affluence maximum avec presque 500 réfugiés à travers le Port de Salau. Bien que cet exil se produise dans un moment de débandade générale, c’est surtout un exil local. La motivation de l’exil fut de continuer aux côtés de la République et la peur des combats, la répression et les abus sur la population civile. Passant par Salau, dans ces jours antérieurs à l’occupation fasciste, on trouve de nombreux groupes: des carabiniers d’Alos et leurs familles, des réfugiés de Malaga qui vivaient dans le Pallars depuis plusieurs mois, des familles du Pallars et surtout beaucoup d’hommes de la Vallée d’Aneu, ayant l'âge d'être enrôlés. Parmi les premiers à passer, il y eut un marchand de bétail avec dix mules, fait qui peut-être n’était pas dû au hasard et qui devait faciliter le passage à travers la neige.

Tous furent arrêtés et identifiés au village de Salau. De là, femmes, enfants et vieux étaient transportés en autobus à Seix, vaccinés et logés, souvent avec la participation de la population civile. Les hommes descendaient à pied les 14 kilomètres jusqu’à Seix. L' étape suivante était la gare de Saint-Girons, d’où les hommes étaient immédiatement rapatriés en Espagne et la population civile éloignée de la frontière, conduite dans un premier temps vers la ville de Rodez en Aveyron.

L’exil par le Port de Salau, fut presque anonyme, sans aucun titre sur les journaux, mais il fut inventorié par les gendarmes et décrit soigneusement dans de petites chroniques du correspondant de La Dépêche à Seix. Accompagnant et parlant au hasard avec les réfugiés, le journaliste recueillit ainsi impressions et informations précises.

“Frontière infranchissable, disions-nous hier, en parlant de celle de l’Ariège, mais le courage désespéré fait trouver des ressources qui dépassane la limitae des forces humaines et c’est ainsi qu’aujourd’hui les populations, en fuyant les Maures de Franco ―ce sont elles-mêmes qui s’expriment ainsi― franchissent le port de Salau, le plus abordable de ceux qui s’ouvrent sur l’Ariège, malgré ses 2.045 mètres d’altitude, malgré la hauteur des neiges qui semblaient en défendre l’accès ” (La Dépêche, 08/04/1938)

“Une femme a accouché à 6 kilomètres de Salau, en pleine montagne, et dans la neige. Les habitants du village et des gardes mobiles sont allés la secourir. L’enfant serait vivant. […] Il en arrive à chaque instant par petits paquets. Des femmes pleurent, portant des enfants, les hommes, déguenillés, haves, bronzés, le regard fixe, des mots écrasés sous les dents, la barbe longue […] Les faibles traînent, se couchent au bord des sentiers et reprennent place avec le groupe qui suit […] Nous rejoignons le premier groupe, qui comprend 7 hommes, 5 enfants, 6 jeunes gens, 2 hommes de 50 ans. Peu après appaissent 27 femmes et enfants dans un état vraiment lamentable. On les vaccine à la gendarmerie de Seix. À 19h. 30, 35 autres réfugiés, accompagnés de carabiniers, passent à Couflens ; 40 autres à 22 heures. Ces derniers précisent qu’à travers la montagne descendent plus de 300 de leurs compatriotes. Ils fuient parce qu’ils sont sûrs, disent-ils, que les soldats italiens et allemands pillent et massacrent tout sur leur passage. Ils arrivent d’Esterri, mais, parmi eux, il y a des réfugiés du sud de l’Espagne, venus, il y a sept ou huit mois, d’Algésiras, de Cadix et Malaga. À Seix, ils sont hébergés dans les maisons et ils mangent à l’hôtel. On donne du lait à volonté à tous les enfants” (La Dépêche 08/04/1938)

“Nous avons pu interroger Mme Trinidad López Delgado, 38 ans, née à Malaga, […] Elle a quitté son pays avec son mari à cause de l’aviation franquiste et par peur des légionnaires marocains. A cause du beau temps, elle assure n’avoir pas trop souffert du voyage sauf à plusieurs endroits où elle avait de la neige jusqu’à la ceinture. Elle remercie les Français de leur accueil et de leurs bons soins, sans oublier la garde civile de Salau” (La Dépêche 09/04/1938)

“La femme qui a accouché à 6 kilomètres de Salau, donnant ainsi un petit Français à notre Couserans, a été recueillie à Salau par une brave femme, Mme Pujol, qui a perdu trois fils lors de la grande guerre. Cette dame se signala par son dévouement durant les inondations d’octobre. Félicitons-la pour son bon cœur d’hier et celui d’aujourd’hui. Le bébé de la refugiée se porte à merveille. Plus tard, il pourra se souvenir de son lit de naissance : au bord d’un sentier dans un berceau de neige” (La Dépêche 10/04/1938)

“La misère des réfugiés : La semaine dernière, une dizaine de réfugiés ont été dirigés sur Rodez. Cette caravane est un résumé poignant du drame espagnol. Il y avait là une mère courageuse avec ses huit enfants, dont le plus jeune avait à peine quelques mois. Partis de Malaga il y a un an, ils furent séparés du père, donton n’a pu retrouver la trace. Avec cette malheureuse famille voyageait un vieillard de soixante six ans, exilé lui aussi de Malaga, et qui avait vu tous ses enfans et sa femme tués par une torpille. Le vieillard, survivant des campagnes de Cuba, racontait tristement ses malheurs ; ses yeux éteints, car il était presque aveugle pleuraient et, avec mélancolie, il nous dit qu’il attendait la tombe comme une délivrance ” (Le réveil Saint-Gironnais, 01/05/1938)



2.1. Le 7 avril 1938. L’exil des carabiniers d’Alos


José Maria Garza Catalan était un jeune carabinier affecté à la douane d’Alos d'Isil depuis le début de 1936. Marié avec Theophile Gil Cuesta, ils avaient un fils Ramon, né pendant le séjour à Alos. Avec le coup d’état, les carabiniers sont toujours restés fidèles à la République. La famille Garza est entrée en France le 7 avril à 15 heures, le 8 ils ont été fichés à Salau. Avec eux, nous avons pu constater la présence d’autres carabiniers d’Alos, comme Antoni Aguilar Peña et son épouse Isabel Campillo Anche. Les hommes furent conduits à Cerbère et vers la Catalogne, les femmes et les enfants à Rodez. Vers 1990, José Maria a écrit, à Toulouse, de brèves mémoires de l’exil des carabiniers.


“Ce devait être les premiers jours d’avril 1938. A ce moment là, le commandant de poste nous réunit et nous apprit les nouvelles du lieutenant qui disaient qu’il fallait passer la frontière, le plutôt possible. Tous unis nous les fîmes. Je revins à la maison et je dis à ma femme : « Prépare le plus nécessaire et une valise, nous allons passer la frontière ». Ce qui fût, fait par tout le personnel des Douanes. Je portais le fusil et le pistolet, une couverture et la valise. Ma femme portait l’enfant. Quand nous étions fatigués, nous posions la couverture sur la neige et nous nous reposions. Il y avait assez de neige […] il faisait un vent froid, et notre fils avait du sang sur le visage à cause de ce vent. C’était une procession interminable tous voulant arriver en terre Française. Je me souviens de la Brèche de Roland. Vers les trois heures de l’après midi, nous sommes arrivés à un sommet, d’où partaient deux montagnes, séparées par un étroit couloir où deux personnes seulement pouvaient passer. Un panneau avec des grandes lettres indiquait : España-Francia. En mettant le pied sur cette terre nous avons dit : « vive la Liberté. Nous sommes libres ! » Nous nous embrassâmes et je ne puis retenir quelques larmes. Maintenant nous descendons et nous arrivons à la tombée de la nuit, dans une vieille grange où nous avons passé la nuit à la belle étoile, guettant le lever au jour, pour pouvoir arriver au village Salau. Avant d’y arriver il y avait une table et cinq gendarmes qui demandaient les papiers et récupéraient fusils et pistolets, nous étions alors désarmés. Arrivés à Salau les femmes et les enfants étaient séparés des hommes. Les premiers furent embarqués dans des camions, ce fut un moment très amer. Nous allâmes en différentes étapes, à Saint Girons. Avant d’y arriver nous passâmes à Seix où on nous vaccina avant d’arriver le jour suivant à Saint Girons, conduits par des gendarmes comme si nous étions des criminels. Nous primes ensuite le train pour Toulouse. A la gare des Gardes Mobiles en formation et armés nous attendaient. Des comités d’entraide voulaient nous donner des colis par les fenêtres du train, empêchés par les Gardes Mobiles.” (Archive de la famille Garza. Traduit de l’Espagnol par Raymond Garza)